Appel à contributions – Numéro spécial de la Revue Africaine de Management La transformation numérique dans les professions comptables et financières : enjeux, opportunités et défis pour l’Afrique
Appel à contributions – Numéro spécial de la Revue Africaine de Management
La transformation numérique dans les professions comptables et financières : enjeux, opportunités et défis pour l’Afrique
Date limite de soumission : 30 juillet 2025
Contexte et Justification
La transformation numérique s’impose aujourd’hui comme une révolution incontournable dans les métiers de la comptabilité et de la finance. Elle se traduit par une adoption massive de technologies émergentes telles que la blockchain, les outils d’analyse prédictive et les systèmes d’automatisation avancés, désormais couramment utilisés dans les cabinets d’audit et les institutions financières à travers le monde (Peng et al., 2023 ; Kokina & Davenport, 2017).
Les grands cabinets internationaux, connus sous le nom des Big Four (Deloitte, PwC, EY, KPMG), ont su tirer parti de ces innovations pour automatiser les tâches répétitives, renforcer les dispositifs de détection des fraudes et accroître la qualité des processus d’audit (Hazgui et al., 2025 ; Faggella, 2020).
Cependant, cette dynamique mondiale se heurte, en Afrique, à des contraintes structurelles majeures. La fracture numérique reste l’un des principaux obstacles : à peine 28 % de la population africaine dispose d’un accès stable à internet, ce qui freine considérablement l’utilisation des plateformes cloud ou des outils d’analyse de données avancés comme Alteryx ou Power BI (Banque Mondiale, 2023). Par ailleurs, un déficit significatif de compétences est à signaler : moins de 15 % des universités africaines proposent aujourd’hui des formations spécialisées en analytique financière ou en technologies appliquées à la comptabilité (UNESCO, 2022). À cela s’ajoute un cadre réglementaire souvent inadapté, marqué par l’absence de législations harmonisées encadrant l’usage et la protection des données financières sensibles (Rodriguez, 2022).
Face à la pression croissante exercée par la concurrence internationale et les attentes des investisseurs, les pays africains s’engagent progressivement dans cette transition, souvent sous l’influence des bailleurs de fonds internationaux tels que le FMI ou la Banque Mondiale, qui conditionnent une partie de leur aide à la modernisation des systèmes de gestion financière. Par ailleurs, certaines multinationales imposent à leurs filiales locales l’utilisation de progiciels de gestion comme SAP ou Oracle, accentuant la diffusion de normes techniques mondialisées.
Pourtant, cette adoption reste souvent déconnectée des réalités locales. Comme le soulignent Almagtome (2021) et Ukpong et al. (2019), les solutions technologiques mises en œuvre ne sont pas toujours adaptées aux contraintes économiques et organisationnelles des pays africains. Par exemple, près de 70 % des PME africaines ne disposent pas des ressources nécessaires pour se doter de logiciels spécialisés tels que MindBridge ou Data Snipper (Banque Africaine de Développement, 2023). De plus, les cabinets comptables locaux tendent à reproduire des outils conçus pour les marchés occidentaux, ce qui aboutit à un décalage entre les pratiques réellement mises en œuvre et les standards officiellement affichés – un phénomène que Bromley et Powell (2012) qualifient de découplage institutionnel.
Ce constat soulève une problématique de fond : assiste-t-on à une transposition d’un modèle inadapté ? L’adoption des normes IFRS sur le continent africain avait déjà été analysée comme le résultat d’un isomorphisme coercitif (DiMaggio & Powell, 1983).
La transformation numérique semble aujourd’hui suivre une logique similaire. En effet, les technologies actuellement promues sont souvent perçues comme des symboles de modernité et d’efficience, alors même que leur impact réel demeure limité dans des contextes économiques où plus de 80 % des transactions s’effectuent encore de manière informelle (FMI, 2023). En outre, les formations proposées dans ce domaine sont très souvent conçues et dispensées par des organismes internationaux, et tendent à négliger les spécificités des environnements fiscaux, juridiques et comptables propres aux pays africains (Ahsina et al., 2020). Comme le suggèrent déjà Causse et al. (2015) dans le contexte de l’adoption des IFRS, la transposition non contextualisée de technologies conçues ailleurs pourrait à terme freiner l’émergence d’innovations locales plus pertinentes pour les petites entreprises africaines.
Objectif de ce Numéro Spécial
Ce numéro spécial de la Revue Africaine de Management vise à explorer les impacts de la transformation numérique sur les professions comptables et financières en Afrique, en mettant en lumière les opportunités, les obstacles et les stratégies pour une intégration réussie.
Axes Thématiques
Les contributions pourront s’inscrire dans les axes suivants (liste non exhaustive) :
- Adoption des Technologies Émergentes
- Utilisation de l’IA, de la blockchain et des outils d’analyse prédictive dans les cabinets comptables et les services financiers.
- Études de cas sur l’implémentation des technologies numériques dans les Big 4 et les PME africaines.
- Comparaison des approches entre l’Afrique et les autres régions du monde.
- Formation et Compétences à l’Ère du Numérique
- Adaptation des curricula universitaires et professionnels pour intégrer les compétences technologiques.
- Rôle des certifications et des formations continues dans la montée en compétence des professionnels.
- Défis liés à la résistance au changement et aux disparités générationnelles.
- Enjeux Réglementaires et Éthiques
- Impact des normes comptables internationales (IFRS) dans un contexte de digitalisation.
- Questions de cybersécurité, de confidentialité des données et de conformité légale.
- Équilibre entre automatisation et contrôle humain dans les processus décisionnels.
- Transformation des Métiers et Avenir de la Profession
- Évolution des rôles des comptables et auditeurs : du traitement des données à l’analyse stratégique.
- Risques de disparition ou de création d’emplois liés à l’automatisation.
- Perspectives pour les jeunes professionnels et les futurs diplômés.
- Innovations Locales et Solutions Adaptées au Contexte Africain
- Initiatives africaines en matière de FinTech et de RegTech.
- Rôle des gouvernements et des institutions dans l’accompagnement de la transformation numérique.
- Études sur l’impact socio-économique de la digitalisation des services financiers.
- Les auteurs sont invités à soumettre leurs articles, rédigés en français (accompagnés obligatoirement d’un résumé en anglais) , exclusivement via le système de soumission électronique de la Revue Africaine de Management, accessible à l’adresse suivante : https://revues.imist.ma/index.php/RAM/user/register.
- Les manuscrits doivent impérativement respecter les consignes aux auteurs ainsi que la politique éditoriale de la revue.
- Chaque article fera l’objet d’une évaluation anonyme par deux experts membres de la commission scientifique.
- Il est également rappelé que le taux de similarité détecté ne doit pas excéder 15 %, conformément à la politique de l’intégrité scientifique de la revue.
- 22/04/2025 : Diffusion de l’appel à contributions ;
- 30/07/2025 : Date limite d’envoi des projets d’articles ;
- 30/10/2025 : Réponses aux auteurs ;
- 30/11/2025: Date limite pour la soumission
- 15/12/2025: Parution du numéro spécial «La Transformation Numérique dans les Professions Comptables et Financières : Enjeux, Opportunités et Défis pour l’Afrique».
Bibliographie indicative :
- Ahsina, K. (2020). Have the Moroccan National Accounting Council and Academics Researchers Overestimated the Benefits of Adopting IFRS? Journal of Accounting and Finance in Emerging Economies, 6(4), 1173–1179.
- Almagtome, A. H. (2021). Artificial intelligence applications in accounting and financial reporting systems: An international perspective. In M. Sarfraz (Ed.), Handbook of research on applied AI for international business and marketing applications (pp. 540–558). IGI Global. https://doi.org/10.4018/978-1-7998-5077-9.ch026
- Bromley, P., & Powell, W. W. (2012). From smoke and mirrors to walking the talk: Decoupling in the contemporary world. Academy of Management Annals, 6(1), 483–530.
- Causse, G., & Mandzila, E. E. W. (2015). Chapitre 2. Les normes comptables dans les pays de l’UEMOA: apport ou frein au développement? In Dynamique normative (pp. 39–49). EMS Editions.
- DiMaggio, P. J., & Powell, W. W. (1983). The iron cage revisited: Institutional isomorphism and collective rationality in organizational fields. American Sociological Review, 48(2), 147–160.
- Faggella, D. (2020). AI in the accounting Big Four – Comparing Deloitte, PwC, KPMG, and EY. Emerj: The AI Research and Advisory Company. https://emerj.com/ai-sector-overviews/ai-in-the-accounting-big-four-comparing-deloitte-pwc-kpmg-and-ey/
- Hazgui, M., Dermarkar, S., & Trottier-Fortin, M. (2025). La transformation numérique dans les Big 4: où en sommes-nous? ACCRA, 22(1), 49–77.
- Kokina, J., & Davenport, T. H. (2017). The emergence of artificial intelligence: How automation is changing auditing. Journal of Emerging Technologies in Accounting, 14(1), 115–122.
- Parra Rodriguez, C. (2022). Ethical principles in the use of artificial intelligence in the financial sector from a European perspective. Studia Prawnicze KUL, (1), 199–221.
- Peng, Y., Ahmad, S. F., Ahmad, A. Y. B., Al Shaikh, M. S., Daoud, M. K., & Alhamdi, F. M. H. (2023). Riding the waves of artificial intelligence in advancing accounting and its implications for sustainable development goals. Sustainability, 15(19), 14165. https://doi.org/10.3390/su151914165
- Ukpong, E. G., Udoh, I. I., & Essien, I. T. (2019). Artificial intelligence: Opportunities, issues and applications in banking, accounting, and auditing in Nigeria. Asian Journal of Economics, Business and Accounting, 10(1), 1–6.